Tapisserie d'Aubusson

La Tapisserie d'Aubusson compte six siècles d'histoire : depuis les «verdures» du XVe siècle, puis la Manufacture Royale de 1665, un début de XXe siècle florissant, la crise de l'entre-deux guerres et sa renaissance grâce à la venue de Jean Lurçat, en 1939.


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Tapisserie - Art textile - Textile - Aubusson - Chef-d'œuvre du patrimoine culturel immatériel de l'humanité

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  • par Robert Four, la Manufacture d'Aubusson perpétue dans ses ateliers l'art respectant les traditions de la tapisserie et du tapis de lisse.... (source : culture.gouv)
L'éducation d'Apollon
(Musée Grobet-Labadié à Marseille), tapisserie en laine et soie de la manufacture royale d'Aubusson, milieu du XVIIIe siècle

La Tapisserie d'Aubusson compte six siècles d'histoire : depuis les «verdures» du XVe siècle, puis la Manufacture Royale de 1665, un début de XXe siècle florissant, la crise de l'entre-deux guerres et sa renaissance grâce à la venue de Jean Lurçat, en 1939.

Historique

Origine

Les origines de la tapisserie sont incertaines. Certains auteurs disent qu'elle doit son origine à des Sarrasins qui se se seraient installés sur les rives de la Creuse après leur défaite à Poitiers en 732}. Mais aussi l'écrit l'abbé Lecler : «Attribuer l'origine d'Aubusson à une troupe de Sarrasins qui, échappés aux coups de Charles-Martel en 732, se réfugièrent en ce lieu, c'est faire du roman, et non de l'histoire. Il est bon de remarquer que c'est l'expression tapis sarrasinois, donné à un genre de tapis fabriqué à Aubusson, qui a donné lieu à cette légende[1].» Selon d'autres auteurs tel Adrien Proust ou Adolphe Blanqui «Il est prouvé que des ouvriers de cette nation s'y établirent, par les réglemens du Châtelet pour la communauté des maîtres tapissiers, lesquels réglemens reconnaissent les Sarrasins pour les plus anciens de ce corps»[2], [3], [4].

Une autre origine envisageable est peut-être liée à Louis Ier de Bourbon, alors comte de la Marche. Il avait confirmé les privilèges d'Aubusson en 1331. En 1331, Louis de Bourbon avait épousé Marie de Hainaut (m. 1354). Tout autant d'éléments qui peuvent laisser supposer que le comte de la Marche, ou alors sa femme, auraient incité des tapissiers flamands à venir sur les bords de Creuse dont on se plaisait déjà à vanter la qualité des eaux acides pour dégraisser la laine et alimenter les teintures.

Que ce soit à l'initiative de Louis de Bourbon, ou, peut-être, de marchands désireux de profiter d'une opportunité locale, l'économie drapière se reconvertit. Les paysans possédaient habituellement des troupeaux de moutons dont la laine était valorisée localement. Elle allait désormais permettre la fabrication de tapisserie. L'influence flamande fut d'emblée évidente dans les ateliers : même technique de la basse lisse, même sainte patronne (Sainte Barbe).

Au demeurant, les premières tapisseries connues d'Aubusson ont été tissées par les frères Augeraing (1501) [5].

Les différentes inspirations

Les verdures

Elles possèdent un aspect énigmatique. L'une des plus belles illustrations est la suite des tapisseries d'Anglards de Salers. Les verdures, sous différentes formes, caractérisent la tapisserie marchoise. Les lissiers les tissèrent au XVIe siècle mais également les siècles suivants. Toujours actuellement, elles représentent une part non négligeable de l'activité des ateliers même si elles sont moins en vogue depuis une trentaine d'années. La verdure, pour énormément, incarne la tapisserie d'Aubusson.

Les scènes de chasse

Les lissiers ont, au XVIe siècle surtout, énormément tissé de scènes de chasse : chasse à la licorne, au loup, au lion, au sanglier, au cerf... Les ateliers réalisaient inlassablement des tentures de cette veine. Elles ne sont pas sans rappeler les verdures mais elles représentent dans des tons sobres des personnages, fréquemment des cavaliers, aidés par des chiens, aux prises avec divers animaux.

Les scènes religieuses

Les ateliers marchois trouvaient l'inspiration aussi dans la religion et la mythologie. La vie des saints, l'Ancien Testament ou encore dans les sujets historiques.

Les artistes

Les peintres du XVIIe siècle

Le peintre Isaac Moillon a réalisé de nombreux cartons qui ont permis un magnifique répertoire pour la tapisserie d'Aubusson, et ce avant qu'elle ne reçoive le titre de Manufacture royale en 1665 [6]. Certaines tapisseries de Moillon sont aujourd'hui exposées dans le Château de Villemonteix en Creuse[7].

Les peintres du XVIIIe siècle

Les fables de La Fontaine de Jean-Baptiste Oudry : Musée Nissim-de-Camondo à Paris

De tous temps, la création a été une préoccupation majeure. Pour Aubusson, l'apport de Jean-Joseph Dumons a été énorme et stimulant. Les ateliers marchois s'inspirèrent aussi énormément de peintres comme Jean-Baptiste Oudry (1686-1755). Il réalisa, dès 1731, des modèles pour Aubusson. L'atelier Picqueaux tissa par exemple Les métamorphoses d'Ovide, étonnamment décorative. On retrouva ce caractère spécifique dans les «verdures fines», «les fables de La Fontaine» ou les chasses. Oudry était en premier lieu un peintre animalier. Devenu directeur artistique des Manufactures de Beauvais (1734) et des Gobelins, il exerça une influence particulièrement forte sur la tapisserie française et par conséquent sur la production marchoise. François Boucher (1703-1770) inspira lui aussi les lissiers qui tissèrent volontiers ses scènes pastorales ou mythologiques. C'était un artiste habile et populaire. Watteau, Jean-Baptiste Huet, Le Brun, Lancret, mais aussi le successeur de Dumons, Jacques-Nicolas Julliard (peintre des manufactures marchoises à partir de 1755) apporterent quantité de modèles. Bien bien entendu, le rôle de Julliard (élève de Boucher) fut important jusqu'à sa mort, en 1790. Julliard, comme Dumons avant lui, collabora avec des artistes creusois dont l'un des plus connus fut François Finet qui, au XVIIIe siècle, se consacra passionnément à la tapisserie. Il excellait dans les chairs et d'une manière plus générale dans les personnages. En 1760, il devint «peintre en chef de Felletin»... Gilbert Finet et François Roby apporterent aussi des cartons aux ateliers, tout comme Sallandrouze. Le travail de Barraband fut spécifiquement intéressant. Jacques Barraband (1768-1809) rencontra une notoriété nationale. Sa gloire naissante fut contrariée par la Révolution. Il dut alors élargir son éventail de production. Il illustra par exemple L'histoire naturelle des oiseaux d'Afrique de Le Vaillant mais aussi divers ouvrages. Il créa des décors, réalisa des cartons destinés aux Gobelins ainsi qu'aux ateliers de savonnerie. Il connaissait la gloire quand il décéda à Lyon où il exerçait comme professeur à l'école spéciale des arts et dessin. Avec Barraband, François Roby marqua son époque. Professeur de dessin à partir de 1742, il suppléa Dumons en fournissant des dessins de tapis et en réalisant des cartons de tapisserie pour la Manufacture de Felletin. En 1805, le sous-préfet d'Aubusson affirmait dans un rapport que les «fabriques ont éprouvé, dans le cours de la Révolution, un anéantissement complet. Elles se rétablissent depuis quelques années et en ce moment leurs produits sont d'une certaine importance. Le luxe indispensable dans un grand état, pourra leur faire reprendre leur ancienne splendeur. Déjà à Aubusson il a été fabriqué des objets destinés aux palais de l'Empereur et des grands dignitaires». Albert Castel, auteur d'un intéressant livre paru en 1876, expliquait que «ce fut l'habitude qu'avaient prise les manufactures d'Aubusson de fabriquer des tapis de pied et de la tapisserie commune qui sauva leur industrie après la Révolution».

Tapisseries d'Aubusson du XVIIe siècle


Tapisseries d'Aubusson du XVIIIe siècle

La tapisserie au XIXe et XXe siècle

La tapisserie, au XIXe siècle, souffrait d'un véritable manque de création. Certes une certaine prospérité revint mais son art continua à s'abâtardir. Elle s'employait de plus en plus à imiter la peinture, perdant ainsi toute personnalité. Les tapissiers, reproduisaient les nuances des toiles peintes. Dégradés et lointains vaporeux se multipliaient à l'infini. En 1917, André-Marius Martin fut appelé directeur de l'ENAD. L'arrivée de ce peintre-graveur forma une chance pour Aubusson. Il allait pendant treize années œuvrer de manière exemplaire en faveur du renouveau de la tapisserie. Peu de temps après avoir quitté la direction de l'école aubussonnaise, il publia un article dans la revue hebdomadaire de l'architecture La construction moderne du premier avril 1934. Il y résumait sa démarche et ses réflexions. Ce texte a conservé un caractère essentiel. Martin posa les bases du «carton moderne» de la tapisserie. Il dénonçait l'influence néfaste d'Oudry (tissage en simili-peinture). En I930, Elie Maingonnat (I892-I966) succéda à Marius Martin à la direction de l'ENAD. Il la dirigea jusqu'en I958. Maingonnat était un disciple de Martin. Il fut son élève avant d'être son collaborateur. Ce descendant d'une vieille famille de tapissiers et de peintres cartonniers se consacra à son tour passionnément au renouveau de la tapisserie. Maingonnat créa des cartons de tapisserie. Il s'employa en particulier à conforter l'école de la tapisserie, la dotant par exemple d'une salle d'exposition permettant d'intéressantes présentations. Elie Maingonnat cherchait à intéresser les artistes à la tapisserie. Il créait des cartons qui renouvelaient le genre des verdures en simplifiant les formes. Il respectait les bases établies par Martin.


Pour la première fois, Maingonnat et François Tabard rencontrent Jean Lurçat à Paris lors de l'Exposition Internationale de 1937. Ils prirent rendez-vous et se retrouvèrent par conséquent à Aubusson durant l'été de la même année. Lurçat demanda à Maingonnat de lui faire tisser des échantillons. Ils furent réalisés dans l'atelier-école que dirigeait Denis Dumontet. L'ENAD tissa surtout Bosquets et Le chien afghan. L'hiver suivant, Tabard entreprit la réalisation de Moissons, une pièce qui partit pour les États-Unis mais Lurçat n'était pas satisfait. Il aborda alors la technique dite du carton numéroté. Le peintre s'inscrivait dans un réel courant rénovateur initié par Marius Martin. En I960, Aubusson accueillit de très nombreux peintres. Michel Tourlière devint directeur de l'ENAD. Des stagiaires fréquentaient cette école et ils rencontraient des artistes de renom comme Calder, Lapicque, Lagrange, Prassinos, Dom Robert... Aujourd'hui, les ateliers tissent des œuvres d'artistes contemporains dans le respect de la tradition.

Les ateliers

Ateliers d'Aubusson et artistes dont les œuvres sont tissées dans ces ateliers

Ateliers ayant cessé leur activité

Pour reconnaître une tapisserie d'Aubusson

Dans le tissage de la tapisserie, pour l'identifier, doivent figurer la marque de l'atelier (M. R. Daubusson, XVIe -XVIIIe siècle, M. R. de Felletin..., logos des ateliers contemporains) et pour les tapisseries du XXe siècle, la signature de l'artiste et le numéro de tissage. Il s'y ajoute obligatoirement un bolduc (petite pièce cousue à l'envers de la tapisserie) qui indique le nom de l'atelier, celui de l'artiste avec sa signature, les dimensions et le numéro de tissage. Chaque modèle est limité à huit exemplaires.

Trop fréquemment, le grand public confond les différents types de tapisseries. Aux côtés de la tapisserie de basse (ou de haute) lisse réalisée à la main existent des productions diverses qui ne sont pas reconnues comme œuvres d'art. Les plus connues sont :

Pour approfondir

Notes et références

  1. André Lecler, Dictionnaire topographique, archéologique et historique de la Creuse, 1902, p. 96 (Laffitte reprints, Marseille, 2000)
  2. «Les premiers tapis ont été fabriqués à Aubusson, dans le Midi, au VIIe siècle, par les Sarrasins prisonniers de Charles-Martel» dans Exposition universelle de 1855. Rapports du jury mixte international publiés sous la dir. de Louis-Napoléon Bonaparte, président de la commission impériale, Paris, Imprimerie impériale, 1856, p. 1080
  3. «On rapporte, généralement, l'origine de cette industrie au temps de Charles Martel, où les Sarrasins se répandirent dans la province de la Marche, mais aussi dans plusieurs autres contrées de la France. Il est prouvé que des ouvriers de cette nation s'y établirent, par les réglemens du Châtelet pour la communauté des maîtres tapissiers, lesquels réglemens reconnaissent les Sarrasins pour les plus anciens de ce corps.», Adolphe Blanqui, Histoire de l'Exposition des produits de l'industrie française, Renard, 1827, p. 249
  4. «Aubusson, dans le département de la Creuse, a été peuplé en partie de Sarrasins», Adrien Proust, Traité d'hygiène, 1881, p. 28
  5. Gilles Rossignol, Le Guide de la Creuse, La Manufacture, 1994, p. 188. La première tapisserie connue de Felletin - la rivale d'Aubusson - est datée de 1457.
  6. Conseil Général de la Creuse. Felletin recevra le même privilège en 1689
  7. Inventaire du ministère de la culture
  8. Atelier Evelyne et Jean Marie Dor
  9. Les ateliers Pinton
  10. Atelier Lelong
  11. La donation Fougerol

Bibliographie

Liens externes

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